Vidéo de l’exposition « Poupées & Tabous à Namur
Poupées et tabous, le double jeu des artistes contemporains. 10 mai 2016
Les grigris de Sophie. Mars 2012

FR3. 26 janvier 2012
FR3 a eu la riche idée de venir filmer la maison de Mariette…
2012 – Novembre – Les affiches de Grenoble

Depuis sept ans, elle fabrique des poupées. Elle en aura bientôt sept cents. Si tout se passe bien, les sept cents seront terminées au printemps prochain. Elle les montrera toutes, alors, ses poupées qu’elle dit « en mal d’enfantement ». On aimerait bien savoir ce qu’elles ont dans le ventre, ces satanées poupées.
Des têtes ! Elles ont des têtes ! Des têtes qui se bousculent et qui poussent, pour sortir et voir le jour « En mal d’enfantement » : Mariette parle de procréation, mais c’est de la création (artistique, s’entend) qu’elle nous entretient. Toutes ces têtes, qu’elle a fabriquées, se haussent du col, fourrent leur nez en l’air, en attente de leur émancipation. L’engendrement est le propre des femmes ; c’est le propre aussi des artistes. Mariette est à la fois artiste et femme: la naissance est son affaire doublement. Mariette voue son art à quelque déesse mère bien ancienne, très antique, aussi vieille que l’humanité.
Déesse mer, tout aussi bien; et même dieu Océan. Contre le mur, l’artiste a posé des lés de papier peint bleu pâle, sur lesquels ont pris place des dessins parsemés de petits bouts de miroir; le tout est recouvert par un vaste filet. De quelle pêche miraculeuse est chargé ce filet ? Ramenée du père Mer vers la Mère terre, la pêche du jour est prise dans les rets : récolte de petits riens et du Grand Tout.
A deux pas une malle séculaire s’ouvre sur d’autres menus délice, coffre aux trésors débordant de babioles, de brimborions, de colifichets et de mirabilia. Des » bricoles », comme on dit familièrement. Mariette bricole effectivement. Elle ne s’encombre pas de concepts: elle est dans le « faire ». Chacun de ses gestes ponctue le temps qui passe, il marque l’heure. En donnant naissance ? En enfantant ses oeuvres, ses têtes, ses poupées, Mariette se met à l’unisson de l’horloge universelle. Elle fabrique des têtes comme on égrène les minutes les minutes; cette invasion de visages, c’est aussi le temps passé qui se donne à voir, d’un coup. Car la dévotion, ici, réside moins dans l’objet fabriqué, que dans la fabrication même. Les minutes fondent-elles comme des sucreries? Ce sont plutôt des bonbons au poivre ? « Drageoir aux épices », ainsi que disait HUYSMANS. Il y a de l’amère terre, dans cette déesse mère.
Jean-Louis ROUX. « Les affiches de Grenoble novembre 2012 »
Affiche de Grenoble. 01 juin 2012

Les poules s’entêtent, donlélé…
Le propre du renard, c’est de fouiner.
(Quand à la fouine, n’en parlons pas.)
A force de fourrer son museau partout, le renard trouve parfois à boulotter. Son nouveau garde-manger, il l’a déniché dans un poulailler des hauteurs de Saint-Laurent-du Pont. Plus souvent qu’à son tour, il vient donc rompre le cou des gallinacés de la petite basse-cour que Mariette a installée au bord de sa maison, sur les hauteurs, etc.. Si bien que lorsqu’on lui a proposé d’exposer à Virieu-sur Bourbre, ladite Mariette a songé à ses infortunées poulettes sans têtes … lesquelles ont fait illico le motif d’un papier peint, dont les lés (donlélé?) ornent les murs de cette exposition au coeur des Terres Froides. Il faut croire que les Terres Froides ont l’esprit chaud. Car l’ardeur, ici, ne fait pas défaut, s’agissant de défendre l’art actuel. Pile en face de l’église et de la place au marché, un lieu associatif d’expositions a ouvert à Virieu, depuis deux ans. Et ça marche ! Animé par l’écrivaine publique VICTORIA SAIZ, l’espace Esperluette a drainé, l’an passé, 2250 visiteurs-soit plus de deux fois le nombre d’habitants de cette commune rurale. Et pour ce qui est de la nouvelle exposition d’Esperluette, elle est consacrée, on l’aura compris, aux rêves parés (et réparés…) de Mariette. Des poignets de corsages en tissu blanc sont cousus sur des bannières en toile, piquées de têtes de vierges à la chevelure de crin noir. Non loin, un petit ange à la tête grimaçante et aux ailes dorées s’extirpe d’un nid, orné de perles de pacotille et de branchettes bourgeonnantes. Sur un mannequin de couturière, une robe en dentelle noire, rehaussée de fleurettes et de visages en céramique, semble tenir en laisse un chien à la peluche pelée-yeux emperlés, gueule encoquillée et crinière tresse… Loin d’elle le désir de choquer: Mariette tire l’aiguille et faufile sa mythologie familiale, imagerie aussi pieuse que domestique, dédiée à l’amour, la mort et l’enfantement. Magie blanche, poupées noires et coeurs rouges transpercés: les doigts de Mariette accompagnent fidèlement l’écoulement des jours, ils cousent un hymne à la vie, un acte permanent de dévotion palpitante. Pendant ce temps le papier peint caquette, dont les lés racontent que les poules sans têtes s’entêtent.
Jean-Louis ROUX
Les affiches de Grenoble et du Dauphiné
vendredi 1 juin 2012
FR3. 26 janvier 2012
FR3 a eu la riche idée de venir filmer la maison de Mariette…
Faut voir, faut lire…
Voici deux livres pleins d’images, d’histoires et de figures.
Deux livres que tout oppose ? Faut voir…
Oui, il faut voir d’abord les Poupées en mal d’enfantement de Mariette. Dans une galerie de portraits, qui tient du livre pieux de jadis et de l’inventaire de momies, l’artiste de saint- Laurent du pont dérange et émeut. Ne serait-ce que par son postulat : » j’ai eu trois enfants que j’aime, et je me suis rendu compte que j’avais été frustrée de ne pas avoir vécu leurs naissances. Il me fallait exprimer cette douleur, ce manque cette frustration ».
Comme un vertigineux prolongement du plus fascinant et du plus énigmatique des processus biologiques, Mariette a ainsi créé sept cents figurines de femmes qui contiennent toute, en elles-mêmes, au-delà es blessures et des déchirures, une promesse de vie. C’est sur le fond ténébreux des pages d’un album pour le moins singulier qu’on découvre la reproduction de ce petit peuple de tissus et de cordelettes, de rubans et de médailles, de statuettes démembrées et de fragments de tableaux anciens. Un peuple qui a manifestement valeur d’exorcisme pour sa conceptrice et qui nous parle d’un autre monde, entre envoûtement et terreur, entre blasphème
Et vénération.
Des poupées , il y en a aussi dans Soudards et belles garces . Pas les mêmes , on l’aura compris .Celles-ci sont nées sous le crayon du géant de la bande dessinée transalpine, Sergio Toppi. Mises en espace par le « raconteur d’images »isérois Mosquitos, les créatures du graphiste milanais sont en perpétuel conflit avec ces montres armés-samouraïs, brutes ou chacals-que le dessinateur se plaît à convoquer et repousser. Chaque tableau offre une scène de guerre ou d’épopée, très pertinemment rehaussée par les textes brefs du poète grenoblois Jean-Louis Roux « l’ horreur est le propre des affreux : l’effroi les laisse froids, l’abomination est leur nation ;leur âme est grimaçante ;alors ils se font le visage qui va avec. Leur figure est un masque, mais sans rien derrière ».
Un univers bien loin de celui de Mariette ? Faut voir, faut voir…Et faut lire aussi.
« Poupées en mal d’enfantement »de Mariette, éditions YMNA (6 bis rue de Châteaudun 2800 chartes)
« Soudards et belles garces » de Sergio Toppi, Mosquito éditions (1 ter rue des sablons 38120 Saint-Egrève).
Didier Pobel
