Grignan. Mars 2010

Mariette, le chamanisme au féminin

mariette-le-chamanisme-au-feminin

Ma mère

Présentée par Les Amis du Facteur, l’artiste Mariette expose à l’espace Ducros De Grignan et on ne peut y rester indifférent !
Mariette est une artiste d’art singulier, pour ne pas dire d’art brut. Elle crée depuis toujours. Elle a des enfants, une grande famille. Son habitation est un musée-maison à visiter absolument. Son univers va du sol au plafond. Ses créations nous paraissent être une invocation répétitive devant le fait de mettre au monde un enfant et de devoir mourir : son monde est un entre-monde proche des anges et de l’opacité terrienne.
A travers ses objets qui ne sont ni de la sculpture, ni de la peinture, tient-elle au bout des doigts un fardeau qui ne veut ou ne peut pas s’alléger ? Elle s’approche d’un mystère, ressasse. Serait-il un vide ? Ou cet infini qui a posé ses pieds sur la terre ?
Beaucoup d’éléments formels sont issu de la religion catholique qu’elle a fréquentée dans son enfance avec ferveur mais qu’elle paganise en une sorte de chamanisme personnel. Il s’agit d’un féminin sauvage, peu accessible, inacceptable, mais pour elle très réel. La vierge, la grande mère universelle, l’obsession de l’enfantement hantent son mobile créatif de façon tout à la fois lyrique et peu apparaître parfois mortifère. L’artiste semble se tenir dans une réalité joyeuse et lourde à la frontière de la mère et de la femme. C’est pourquoi ses oeuvres peuvent repousser, voire choquer.


la-couveuse

La couveuse

Non rationnelles, elles nous conduisent souvent dans l’organique, s’y enferme de façon même têtue. Partout, dans chacun de ses objets, un chant formel se déploie vers un insondable qu’un ange protège. En des temps anciens on aurait menacé de sorcellerie tout ce fatras bien ordonné et soigné que Mariette veut beau.
Des oeuvres, ou plutôt des petits autels dressés pour une fée sans nom, sans doute maternelle, pour l’ange, peut-être celui de l’esprit d’enfance ? Ce sont des reliquaires, des ex-voto, des tabernacles, des rebuts, des jouets, chaque fois composés et bricolés qui célèbrent donc une beauté sans cesse à dire. Des objets métamorphosés, qui ont été glanés dans les vide-greniers, les puces. Le tout ficelé, lié, fagocité. Mariette n’a pas peur puisqu’elle le dit. On ne peut qu’aimer ou rejeter son travail. C’est une archaïque contemporaine.

Peut-être qu’elle danse joyeusement et spirituellement avec les loups ?

Mars 2010.

Françoise Vergier